Texte : Alexandre Metzger - 19 octobre 2021

Candyman III: le Jour des Morts

Décrochage annoncé

Exit la musique de Philip Glass, pourtant indissociable de Candyman, exit Clive Barker au poste de producteur exécutif pour cette ultime suite réalisée à la toute fin du vingtième siècle. La saga initiée par Bernard Rose et Bill Condon perd indéniablement une partie de son âme et Candyman III sent le soufre avant même de glisser ce Direct To Video dans le lecteur. Aux commandes du film, Turi Meyer, scénariste de Leprechaun II et réalisateur d’un dispensable Sleepstalker, ne semble pas tout à fait avoir le profil pour mener à bien Candyman III. D’emblée, il nous propose un générique assez ridicule, faisant tournoyer le fameux crochet sous tous les angles. Tony Todd, lui, s’accroche à son rôle de boogeyman romantique, en rempilant non sans mal pour la troisième (et dernière?) fois. Le reste du casting est assez improbable, l’ex-playmate Donna D’Errico étant soudain propulsée tête d’affiche d’un film d’horreur, après avoir piétiné pendant plusieurs saisons, très alerte, les plages de Malibu. Malgré tous ces handicaps, Candyman III est le chef-d’œuvre inattendu que tout fan de la série était en droit d’attendre… Mais non bien sûr, le film est une véritable catastrophe et la preuve malheureuse que si une suite est confiée à la mauvaise équipe, elle peut totalement changer de visage, un reflet déformé de ce qui a fait le charme et la beauté de la saga jusqu’à présent. Pour se donner bonne conscience, autant le regarder une fois dans sa vie afin de pouvoir en juger par soi-même, mais il n’est pas interdit de l’oublier…

Intentions louables

Pourtant, le réalisateur semble au départ avoir assimilé l’essence de la saga. Situant son film pendant le Jour des Morts, fête traditionnelle pour la population hispanique de Los Angeles, c’est l’occasion pour Turi Meyer de dépeindre un quartier populaire, où là aussi le mythe de Candyman est bien connu, dans la rue comme dans la cour d’école. Caroline McKeever est l’arrière-petite-fille de Daniel Robitaille, l’homme devenu légende urbaine, peintre de renom en son temps. Elle organise une exposition des œuvres de son ancêtre afin de rendre hommage à l’artiste et tenter de faire oublier le mythe terrifiant qu’il est devenu. S’en suivent rapidement des éléments de scénario dignes d’une série policière à l’ancienne: une enquête insipide menée par un duo de flics pas très subtils, doublée d’une romance inévitable et des bons sentiments qui l’accompagnent, qui engendre plusieurs scènes qui sont uniquement des prétextes de voir Donna D’Errico défiler en tenue légère. Une histoire de gang se greffe à un moignon de scénario, des gothiques venus de nulle part, adeptes du croquemitaine et qu’on dirait sortis d’un The Crow du pauvre… Une guérisseuse exorciste vient apporter la touche de philosophie devant laquelle on ne peut que s’incliner : “Le mal ne peut pas exister dans le bien”, “La mort fait partie de la vie”…

Candyman lover

Tony Todd a une nouvelle fois l’occasion de retrouver le personnage de Daniel Robitaille de 1890, où l’on voit l’artiste à l’ouvrage, tant dans sa peinture que dans sa relation avec sa bien-aimée Caroline Sullivan, jusqu’à l’ultime et fameuse torture qu’il endura. Des scènes sans âmes, à l’image de la mise en scène sans souffle de Turi Meyer et de sa direction d’acteurs: Donna D’Errico ne s’en sort pas si mal et joue même mieux qu’elle ne fume. Sa coiffure semble toujours impeccable et c’est l’essentiel. Son jeu limité fait pâle figure face aux précédentes héroïnes de la saga mais on sent chez elle une volonté de donner tout ce qu’elle a et la mauvaise qualité du film est loin de lui être imputable. Candyman, venu chercher la chair de la chair de sa chair (son arrière-petite-fille quoi), semble bien fatigué de répéter encore une fois le même schéma, et de répéter le même dialogue inlassablement : “Sois ma victime” est entendu au moins quatre fois et ses apparitions exagérément théâtrales pour déclamer sa poésie macabre sonnent faux. Candyman devient victime de lui-même au final, frôlant la parodie. Le film de trop assurément, le troisième acte d’une trilogie malheureuse qui va enterrer la saga pour une vingtaine d’années. Turi Meyer, victime ultime du Candyman, se condamne tout seul à une carrière de réalisateur et scénariste de télévision…